La Sirga de William Vega

Publié le par happy rain

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Le cinéma d'Amérique du Sud ne cesse de nous offrir des films à la fois simples et splendides.

A plusieurs moments, le long métrage colombien La Sirga m'a rappelé le très beau Sudoeste d'Eduardo Nunes, pas tellement dans la mise en scène mais dans le scénario et ce personnage féminin qui vient d'on ne sait où et qui ne sait pas vraiment où elle va. Les deux films partagent certaines ombres dans l'histoire qu'ils racontent.

Il est ici question d'un conflit armé, d'une jeune femme qui a perdu ses parents dans cette guerre sans nom, de la recherche d'un oncle comme seul parent encore vivant, d'une auberge accueillante mais au milieu de nulle part et toute trouée, complice des regards indiscrets, d'une coopérative agricole fragile, du retour d'un cousin aux agissements et mises en gardes étranges et d'un beau et mystérieux protecteur...

Tout se passe au bord d'un immense lac des Andes, entouré de hautes montagnes. Alors qu'Alicia, notre héroïne devenue orpheline espère trouver la quiétude auprès de son oncle et de là où il vit, la menace rode de la brume au dessus de l'eau à la pointe des épouvantails aux allures d'hommes empalés...la guerre est derrière les hauts sommets et pourtant elle est là, dans toutes les pensées, tapie dans une botte d'herbes qui se déplace sur le lac. Mais heureusement, William Vega, le réalisateur de ce film, a préféré déjouer les attentes du spectateur. Rien ne se passe comme nous pourrions le croire. La lenteur et le silence des personnages sont à la fois apaisants et inquiétants. 

A chaque plan, l'apreté cotoie la douceur. La priorité est donné au naturel même dans les images les plus belles. Alicia a beau avoir connu des moments difficiles, elle semble bien décidée à ne pas se laisser aller et ne compte pas être un poid pour son oncle. De ses petites mains, elle redonne fière allure à l'auberge. La Sirga offre une réflexion intéressante sur le fait de se reconstruire, sur la relation à l'espace et aux autres. La notion de famille est boulersée mais pas reniée. Le corps est filmé avec élégance, en tant que matière mais aussi dans ce qu'il provoque de désir chez l'autre et dans ce qu'il créé un lien là où la parole manque. 

La Sirga est le premier long métrage de William Vega. Cela impose le respect. Un premier film aux accents à la fois poétiques et politiques. En ces temps difficiles pour les indigènes et les paysans, pour ceux qui pratiquent encore une économie locale, la Sirga vient subtilement éveiller les consciences. 

Et c'est peut être mon imagination qui me joue des tours mais il m'a semblé percevoir l'influence de Michelangelo Antonioni dans certains des plans de La Sirga, notamment dans ces lents travellings sur des paysages désolés, accompagnés de personnages qui sortent du cadre et réapparaissent plus loin.

Il a été présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes et devrait normalement sortir prochainement en salles. En attendant, vous pourrez le voir en avant première au festival Indépendance(s) et Création à Auch, entre le 11 et le 14 octobre 2012 !  

Publié dans critique de film

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